par Odile Sankara

La valeur culturelle est le ciment de la vie. C’est la seule qui permet de convoquer toutes les valeurs cardinales nous structurant en tant qu’humanité. Les principales sont la solidarité, le respect, l’intégrité.
Quelle ville nous a-t-on léguée et comment en avons-nous pris soin ?
Ou quelle vie nous a-t-on léguée et comment en avons-nous pris soin ?
En Afrique, la ville est dans le village ou à l’inverse, un village dans la ville. Beaucoup ont fui les contrées lointaines pour venir en ville, gardant ainsi leurs habitudes culturelles. De telle sorte que nous avons encore à certains égards, des formes de solidarité qui créent du lien et permet le vivre ensemble. Il est de coutume que des familles venant de la même région ou partageant la même identité culturelle se retrouvent dans le même secteur de la ville. Cela crée une communauté de personnes vivant les mêmes réalités économiques, socio-culturelles et bien évidemment, politique également. En conséquence, il y va de leur survie de développer des formes de solidarité et garder ainsi des valeurs inhérentes à celles-ci telles que le respect, la convivialité, le vivre ensemble, etc.
Un autre aspect qui est intéressant pour nous en Afrique parce que symbolique, c’est la taille de nos villes. La plupart sont de taille humaine favorisant ainsi le vivre ensemble. Cela s’explique par le fait qu’on arrive à se connaître presque tous. Chacun tente de préserver le lien social à sa façon. Cultiver les gestes les plus intimes dans sa forme poétique. Comment s’adresser à l’autre ? Et par la parole et par l’attitude corporelle. Rentrer chez le voisin et lui donner le bonjour. S’émouvoir des situations problématiques de son entourage. Voilà le visage humain de nos villes africaines. Et ça devrait être le cas partout. En tant qu’artiste, je suis sensible à la question humaine et j’agis dans ce sens à travers mes lignes de choix artistique. Car rien n’est jamais acquis, il faut rester vigilant. 
Nous devons rester les dignes filles et fils d’un terroir. Porter l’héritage que nos devanciers nous ont légués, en prendre soin. Nous devons le continuer avec abnégation pour qu’il ne meurt point. « Tenir la main au futur pour qu’il ne tremble pas ». C’est une grande responsabilité spirituelle et morale assez profond. 
A l’inverse, certaines de nos villes en l’occurrence les capitales africaines n’échappent pas à la règle des villes grandissantes où les questions économiques et politiques sont les maîtres mots. Des capitales qui n’ont pas trouvé leur identité mais se calquent sur le model venant d’ailleurs. Cela a créé une situation phénoménale qui s’apparente à la jungle où l’Avoir est souverain à l’Etre. Le vivre ensemble devient impossible car les citadins sont pris dans la nasse des problématiques et enjeux de la ville. Ils deviennent des esclaves bien enchaînés, perdus, parfois même déshumanisés dans leur espace de vie. 
En conséquence, toutes les valeurs inhérentes au vivre ensemble, par exemple La solidarité, le respect ne font plus partie des mœurs. C’est le « pousse-toi » que je m’y mette. 
L’urbanisation soldé par la construction de cités hermétiquement fermées, tue notre humanité puisque chacun vit dans sa tour d’ivoire. L’individualisme fait partie des nouvelles valeurs.
Le problème est complexe et est à deux niveau :
Premièrement, le pouvoir administratif et exécutif est centralisé en ville dans la capitale.
Deuxièmement, le capitalisme nous a poussés à la course vers le gain.
La ville est aujourd’hui à cette image. C’est le lieu de toutes les contradictions et de tous les vices : La corruption, la drogue, l’injustice, l’esclavage moderne, les questions sanitaires…

Odile Sankara è un’attrice e artista del Burkina Faso